Luigi Carbonara est arrivé à Thionville en 1956, en provenance de Bari en Italie. Il fût accueilli à la gare par Monsieur Ricard, qui parlait très bien italien, direction Sérémange pour travailler chez SOLLAC. Il avait obtenu un contrat de travail suite à un accord de gouvernements entre la France et l'Italie. « Dès le lendemain, au travail! » nous dit-il. Il se souvient encore de son numéro d'immatriculation : 11741.
Très vite, il passera le permis de conduire des ponts roulants, ce qui restera longtemps sa fonction. D'abord, SOLLAC le loge pendant 2 ans à Florange, rue de la vallée. Puis, en juillet 1958, Monsieur Carbonara va en Italie chercher sa famille et revient pour habiter à Koenigsmacker. Après 3 mois, SOLLAC les déménage à Hébange où l'usine du laminoir à froid n'existait pas encore.
En février 1961, il emménage avec sa famille à la Côte des roses, au 20 chaussée d'océanie, 4° étage, à gauche. Selon son souvenir, ils furent les premiers à rentrer dans l'immeuble fraîchement construit au milieu des vergers. Il se rappelle qu'au tout début, les appartements étaient chauffés par des chaudières au coke, au charbon, avant le gaz de ville. L'appartement était grand, avec 6 chambres à coucher et 2 toilettes, « mais 1 seul ballon à eau chaude! » précise-t-il. Dans la même entrée, les voisins avaient 8 ou 9 enfants par familles. Les logements de la chaussée d'Océanie étaient presque tous des appartements pour familles nombreuses venues d'Italie ou du midi de la France. D'ailleurs, Monsieur Carbonara nous raconte qu'il y avait une petite guerre entre les lorrains/alsaciens et ceux du midi. Il habitera pendant 20 ans dans ce grand appartement avec sa femme et ses 7 enfants. Puis, en 1981 ils s'installent impasse Corneille, où ils résident encore aujourd'hui avec son épouse. Le travail pour Monsieur Carbonara, c'était départ à 4h30 et retour à 21h30. Lorsqu'ils avaient quelques dimanches de repos, ils allaient voir des amis ou de la famille dans la région. Mais il n'y avait pas trop d'activité ou de vie de quartier, alors qu'aujourd'hui il y a pas mal de choses. Pour Monsieur Carbonara, c'est bien que les jeunes aient un local pour se regrouper, un terrain de foot ou des activités à la Maison de quartier.
En 1972, après 15 ans de travail, SOLLAC lui remettra une médaille d'argent avec 1 mois de salaire. Il part en retraite en 2000, à 65 ans.
Il nous explique que la reconstruction de l'après-guerre appelait la main d'œuvre. Il y avait du travail pour tout le monde. Aujourd'hui, il n'y a rien à construire. Pour lui, « ne vont rester que des corbeaux. » A l'époque, il y avait 12500 personnes qui travaillaient à la pyramide à SOLLAC. Mais les conditions étaient différentes à son époque. Il y avait un seul bus pour déposer les ouvriers au laminoir à froid, au laminoir à chaud et la cokerie. Il étaient serrés « comme des bêtes » et le bus était payant ! En 1968, dans le rythme des mouvements sociaux de mai, ils décident de faire grève et de bloquer l'autoroute. Le préfet changera alors leurs conditions en mettant à disposition plusieurs bus, gratuits.
Lorsque l'immeuble de la chaussé d'Océanie a commencé à être démoli[[1]], Monsieur Carbonara reconnaît que c'est un peu de leur jeunesse qui s'en est allée. Mais il pense que c'est pour des choses meilleures, pourquoi pas? De plus, ces immeubles étaient au départ prévus pour 30 ans, alors...
Maintenant que la première entrée de la chaussée d'Océanie a été démolie, c'est un nouveau paysage qui s'offre à lui depuis son balcon. Son immeuble a récemment fait partie d'un plan de rénovation et avec le double vitrage de ses carreaux il n'est pas dérangé par la proximité de la circulation de la chaussée. Mais il ne sait pas encore ce qui est prévu pour réaménager le square Fénelon. Il attend d'être informé par la ville. Lui, il verrait bien un petit parc et surtout moins de voitures.
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